VERS LÀ-BAS
Les émigrants transis
sous l’horloge des quais déserts
Et dans le cœur les paysages sans nom
Le matin découvert
La tenture dénouée et le flot de rubans
Sur la poitrine
Sous la poitrine
le souffle des remous brûlants
Cet air passé dans les tubes de cuivre
dans les labyrinthes mis-clos du soleil
Dans le cirque
Dans le cadre arrondi des collines où vient dormir
la mer
Au fond la chaleur soude toutes les racines humaines
Au même sol
L’oiseau l’esprit dans le même air chauffé
prennent leur vol
sur le sens des raisonsla direction des vagues
Sous les bornes du temps cachées à l’horizon
et le bruit ralenti et sourd des pas de charge
Au fond des voûtes sans limites des faubourgs
Les yeux qui se sont ouverts là attendent
Les étoiles qui brûlent dans la nuit descendent
Tous les cœurs sont pressés
Les astres détachés
Et les bâteaux glissent
En déchirant la mer de leurs feux allumés
Pierre Revedy
Sources du Vent (1929)
in Main d’œuvre
Mercure de France, Paris, 1949.